Je dirais même plus...

jeudi 30 décembre 2010

Youpi, c'est la fête !

Sondage RMC :
80 % des Français n'aiment pas fêter le Nouvel An.
J'aurais bien une solution un peu folle, qui serait de ne pas le fêter... Je sais, je sais, c'est couillu et ça peut aller chercher dans les 10 ans de taule, mais ça vaudrait le coup d'essayer, non ?

mardi 28 décembre 2010

Chronique d'une mort annoncée

Je ne suis peut-être pas d’un naturel foncièrement optimiste, mais s’il y a une antienne qui ne m’inspire aucune inquiétude, c’est bien celle de la « désaffection des gens pour la lecture ».
D’abord parce que j’ai grandi en entendant annoncer cette « catastrophe » à l’envi sans jamais vraiment la constater moi-même. Dans les années 90, c’étaient les jeux vidéo et le déferlement de programmes abrutissants à la télévision qui devaient, à coup sûr, tuer le livre. On attend encore l’enterrement… Aujourd’hui, ce sont internet et le téléphone portable qui s’apprêteraient à porter l’estocade à la littérature, tout comme ils auraient déjà estourbi l’orthographe. Pourquoi pas… La seule chose que s’apprête à estourbir internet, à mon avis, c’est la télévision (ironie du sort…), mais c’est un autre sujet.
Et puis surtout, j’ai beau faire tous les efforts du monde, je ne vois pas où serait le drame même si les gens ne lisaient effectivement plus du tout. On me dira que la lecture est un outil de culture, et que la désaffection des gens pour les livres est donc symptomatique d’une tendance à la « déculturation ». Soit. Mais, à supposer que cette désaffection existe, elle n’est, précisément, que cela : un symptôme. Autrement dit, elle montre le problème de la « déculturation » par le petit bout de la lorgnette. Jetez un œil au programme d’histoire d’un lycéen. Comparez le niveau du baccalauréat d’aujourd’hui à celui du « certif » d’antan. Voyez si les « élites » médiatiques, artistiques ou politiques sont cultivées ou si elles prônent la culture (et si oui, quelle culture ?) On reparlera de la lecture après cela.
Second argument (dont il est plaisant de constater qu’il est, presque toujours, dissocié du premier) : la lecture est un plaisir immense dont beaucoup se priveraient, sans savoir ce qu’ils perdent. Rien n’est plus vrai. Mais l’humanitarisme s’est-il à ce point développé que l’on trouve désormais le temps de s’émouvoir du sort des « non-lecteurs » ? Le droit d’ingérence a-t-il à ce point tout conquis qu’on croie légitime de faire le bonheur de ces infortunés malgré eux ? Va-t-on bientôt leur larguer, par hélicoptère, des colis de survie contenant les œuvres complètes de Balzac ou de Proust ? Va-t-on organiser un « Bibliothon » ou un « Marathon des Mots » pour leur « redonner le goût de lire » ? (À vrai dire, j’ai peur que ça n’existe déjà – pas le courage d’aller vérifier.)
Est-ce que je crois que la lecture est enrichissante ? Je pourrais – si le sujet n’était pas beaucoup trop intime – citer, sans trop y réfléchir, cinq ou six ouvrages qui ont changé ma vie, au sens propre. Est-ce que j’aime lire ? C’est l’un de mes plus grands plaisirs sur cette terre. Comme l’avait dit Marc-Édouard Nabe dans son suicide médiatique de jeunesse, un livre c’est « un monde qui arrive, cosmiquement » : « on entre dans un auteur comme dans une cathédrale, on est complètement envahi », on « vit pour ça », on en « transpire ».
Cela dit, en ai-je quelque chose à foutre que mon voisin du dessus préfère lire Albert Camus, Alexandre Jardin, le dernier catalogue Ikea ou pas même cela ? En toute franchise, rien du tout. Suis-je peiné de constater que certaines de nos têtes blondes « boudent les livres » (comme disent les journalistes) ? Pas plus. Je laisse à leurs parents le soin de s’en émouvoir à ma place ; ces parents qui ont vécu dans la trouille de passer pour fachos ou d’ « écœurer » leurs rejetons en leur imposant la moindre lecture, et s’étonnent ensuite que le petit dernier ait à peine suffisamment de vocabulaire pour envoyer un sms.
On me dira encore que les lecteurs d’aujourd’hui sont les écrivains de demain. Plus de lecteurs, plus d’écrivains. Soit ! On s’en passera. J’aurais de quoi remplir trois vies avec tous les chefs d’œuvre déjà écrits que je n’ai pas encore lus. Plus d’éditeurs non plus pour les diffuser ? Pas grave ! Il restera les bibliothèques. Je doute qu’on décide de les fermer dans les années qui viennent, quand bien même plus personne n’y mettrait les pieds. Pour une fois, le spectre des bûchers de livres sur fond de croix gammées servirait à quelque chose.
Quoi qu’on en dise, la lecture est un plaisir fondamentalement solitaire et égoïste. En ce qui me concerne, tant que j’aurai un œil valide, tous les « lecteurs », « non-lecteurs » et « faux lecteurs » du monde pourront bien aller au diable !

vendredi 24 décembre 2010

La formule du jour

Au sujet d'un restaurant :
J'ai trouvé ça un peu cher pour le prix...

dimanche 12 décembre 2010

Na !

Je voudrais voir un peu Louis XIV avec un « assuré social » !... Il verrait si l’État c’est lui !... pensez les milliards que représente le moindre cotisant ! ah, Louis peigne-chose !... pensez, Louis-Soleil, la trouille rien que pour changer de chirurgien ! il vivait plus !... l’étiquette !... votre « assuré » si il se gratte pour vous foutre en l’air ! vous traiter pourriture poisson !... vos conseils ?... ah, là là ! vieux pitre !... « vacances » qu’on vous demande ! et signez !... tampon et salut ! vieux parasite ! « huit jours, comprenez !... un mois !... et merde ! satané clown ! votre cachet !... vos ordonnances ?... à rire !... à rire !... déjà des pleins tiroirs et chiottes d’ordonnances ! et autre chose que vous ! des plus grands maîtres et Professeurs et Chiropractes de Neuilly, Saint-James et Monceau ! quels salons !... de ces tapis ? des pelouses !... dix infirmières !... vingt dictaphones !... eh bien ! eux-mêmes ! ces demi-dieux, ce qu’ils ont prescrit, on s’en torche ! alors vous ?... votre tampon !... vite ! regardez pas !... signez !... salut ! »
Louis-Ferdinand Céline, D’un château l’autre, 1957.

jeudi 9 décembre 2010

Le scoop-marronnier

Chutes de neige :
Nous n'avons pas connu ça depuis 30 ans !
Oui. Comme l'an dernier, en somme...

mercredi 8 décembre 2010

Décalé, évidemment...

Fascinant...

dimanche 5 décembre 2010

Sortie dominicale 2

Ouverture de certains commerces le dimanche...
Cet après-midi, les grands magasins ont opportunément servi de refuge contre le froid.
C'est vrai qu'on croise beaucoup de SDF aux Galeries Lafayette...

Tout le monde descend

Quartier lointain, manga de Jirô Taniguchi :
Hiroshi, homme d’affaires de 48 ans marié et père de deux enfants, un peu porté sur la bibine, prend par erreur un train qui le ramène dans la ville de son enfance. Après qu’un étrange malaise s’est emparé de lui devant la tombe de sa mère, il se retrouve au début des années 60, dans la peau du gamin de 14 ans qu’il a été. Sa mère est vivante, sa famille heureuse. Sans savoir si cette aventure n’est qu’une parenthèse rêvée ou une véritable nouvelle vie, il reprend l’école, retrouve ses vieux jeunes amis dont il connaît déjà le destin et revit ses premiers émois amoureux. Mais surtout, il a quelques mois pour résoudre un mystère qui a pesé lourd dans sa vie : pourquoi, un beau jour, son père a-t-il décidé de prendre un train pour ne jamais revenir ?
Scénario et dessin très soignés pour ce grand classique du manga récemment adapté à l’écran (encore un !). Un peu trop soignés, peut-être ? On a plaisir à suivre les aventures d’Hiroshi et certaines scènes sont carrément jouissives. Taniguchi exploite habilement les situations qu’appelle son histoire : jeux d’échos et de déjà-vu, mélange de pouvoir donné par la prescience et d’impuissance à en tirer profit, décalage entre le corps et l’esprit… Mais l’ensemble tourne parfois un peu en rond ou à vide, et l’issue demeure assez convenue (« hésitation » entre rêve et réalité ; idée selon laquelle c’est en se replongeant dans son passé / enfance que l’on devient adulte…) Sur ce terrain-là, autant lire A Christmas Carol de Dickens.
Autre réserve, la seconde adolescence de ce garçon m’a paru bien lisse, pour ne pas dire gentillette. La faute au décalage culturel, sans doute. Je ne suis pas vraiment le public cible de ce manga : je n’ai pas grandi dans le Japon des années 60, et en l’occurrence, il me semble que c’est, au moins dans une certaine mesure, un problème. J’ai conscience des références glissées çà et là (d’autant que le traducteur les décode souvent, sous forme de notes de bas de page), mais je n’y suis évidemment pas sensible. C’est mal barré pour la nostalgie. Cette enfance n’a pas été la mienne.

dimanche 28 novembre 2010

The Return Home

It was then that Mrs. Darling began playing again.
“It’s mother!” cried Wendy, peeping.
“So it is!” said John.
“Then are you not really our mother, Wendy?” asked Michael, who was surely sleepy.
“Oh dear!” exclaimed Wendy, with her first real twinge of remorse, “it was quite time we came back,”
“Let us creep in,” John suggested, “and put our hands over her eyes.”
But Wendy, who saw that they must break the joyous news more gently, had a better plan.
“Let us all slip into our beds, and be there when she comes in, just as if we had never been away.”
And so when Mrs. Darling went back to the night-nursery to see if her husband was asleep, all the beds were occupied. The children waited for her cry of joy, but it did not come. She saw them, but she did not believe they were there. You see, she saw them in their beds so often in her dreams that she thought this was just the dream hanging around her still.
She sat down in the chair by the fire, where in the old days she had nursed them.
They could not understand this, and a cold fear fell upon all the three of them.
“Mother!” Wendy cried.
“That’s Wendy,” she said, but still she was sure it was the dream.
“Mother!”
“That’s John,” she said.
“Mother!” cried Michael. He knew her now.
“That’s Michael,” she said, and she stretched out her arms for the three little selfish children they would never envelop again. Yes, they did, they went round Wendy and John and Michael, who had slipped out of bed and run to her.
“George, George!” she cried when she could speak; and Mr. Darling woke to share her bliss, and Nana came rushing in. There could not have been a lovelier sight; but there was none to see it except a little boy who was staring in at the window. He had had ecstasies innumerable that other children can never know; but he was looking through the window at the one joy from which he must be for ever barred.
James Matthew Barrie, Peter Pan, 1911.

À moi la vie d’artiste…

Décidément, ces histoires pour enfants revisitées, il y a un truc. Décidément aussi, le fait d’arriver bien après la bataille devient chez moi une fâcheuse habitude… Chanter les louanges du Peter Pan de Loisel 20 ans après la publication de son premier épisode reste certes mon plus bel exploit. Il n’empêche, après en avoir dévoré les six tomes, je ne peux que confirmer ma première impression : c’est de loin la BD la plus ambitieuse que j’aie lue depuis très longtemps.
Dans ma lancée de découvreur de talents, voilà maintenant que je m’extasie, tout naïf, sur le Pinocchio de Winshluss, presque deux ans après qu’il a obtenu le Fauve d’Or du meilleur album à Angoulême. Rapide à la détente, quoi… Je peux toujours me consoler en me disant que j’avais pressenti le lauréat 2010, mais bon…
Quoi qu’il en soit, le Pinocchio en question, « très librement adapté du roman éponyme de Carlo Collodi » (c’est peu dire – il s’agirait plutôt d’une adaptation très libre du Disney, qui n’a déjà à peu près rien à voir avec le roman), ce Pinocchio, donc, est impressionnant de maîtrise technique. Les sources d’inspiration et les clins d’œil graphiques y sont innombrables, de l’univers Disney des années 50 (justement) au manga en passant par l'estampe, les affiches de films de série B et les comics. Chaque case est pensée comme un petit tableau, presque autonome. Il faut dire que la plupart d’entre elles sont muettes, ce qui ne laisse guère de place à l’à-peu-près, mais incite le lecteur à s’attarder sur le moindre détail.
Côté scénario, rien à redire. L’angle d’attaque choisi par Winshluss est original : son Pinocchio n’est qu’un robot en ferraille sans conscience apparente, conçu par Geppetto comme une arme de guerre dont il espère tirer profit. Comme on peut s’en douter, la machine échappe rapidement au contrôle de son créateur et se met à errer à travers le monde. Témoin la plupart du temps passif de leurs turpitudes, il a pourtant le don de réveiller les instincts homicides de tous ceux qu’il croise. Mais il n’est pas facile de tuer un robot.
Pour nous narrer ses déboires, l’auteur a le bon goût d’utiliser quelques ficelles finalement assez classiques mais là encore fort bien maîtrisées. L’histoire chorale sans la lourdeur : Pinocchio, Geppetto, Jiminy Cafard (!) et une foule d’autres personnages suivent des trajectoires indépendantes, toutes plaisantes à suivre, qui sont appelées à se croiser à un moment ou à un autre, mais toujours de façon inattendue. De même Winshluss a-t-il souvent recours au détournement de contes classiques, mais sans « iconoclasme » gratuit : il s’agit avant tout de servir l’histoire. On assistera donc, en vrac, à la naissance de Monstro, aux tribulations de la femme de Geppetto (ex-gloire de la photo de charme qui s’ennuie ferme à la maison), aux débordements d’amour des sept nains pour Blanche-Neige ou pour tout ce qui pourrait y ressembler, aux activités lucratives mais crapuleuses de Stromboli, PDG d’une multinationale du jouet, ou encore aux guerres sans merci que se livrent deux clowns despotes pour le contrôle de l’Île enchantée. Résultat : les ruptures de ton sont continuelles dans Pinocchio. Bien que l’ambiance générale en soit très sombre (y sont évoqués, entre autres, l’abandon, la pédophilie, le suicide, le trafic d’organes, la séquestration, le viol, le meurtre, la dictature, la stérilité, le fanatisme), des épisodes plus légers voire franchement comiques viennent ponctuer le récit, comme les « Aventures de Jiminy Cafard », écrivain raté qui a élu domicile dans le ciboulot de Pinocchio. Un vrai plaisir !

mardi 16 novembre 2010

RoboCop ou l'art du dialogue social

Je viens de revoir RoboCop 2, qui était l’un de mes films d’action / science-fiction préférés quand j’avais 10 ou 11 ans, mais sur lequel je n’étais jamais retombé depuis. Eh bien sans me vanter, je trouve que j’avais plutôt bon goût. Ce film est un putain de chef-d’œuvre ! End of story.
Bien sûr, j’y ai retrouvé ce qui m’avait plu quand j’étais gosse. D’abord, un univers beaucoup plus violent et moins gnangnan que celui des films d’action traditionnels. Ensuite, au lieu de la lourdeur du discours habituellement estampillé « science-fiction », d’autant plus dérisoire qu’il se prend au sérieux (« Eh, regardez : c’est de l’anticipation. Cette histoire parle de ce que notre société risque de devenir… » – Oh! Shut the fuck up, dude!) – au lieu de ça, donc, une bonne dose d’humour noir et d’ironie, comme dans cette fausse pub qui constitue la première scène du film.
Et puis surtout, il y a cette séquence hilarante de la reprogrammation de RoboCop. Dans une ville de Detroit rongée par la violence, les huiles de la société géante qui fabrique le fameux flic robot (l’OCP : Omni Consumer Products) « s’inquiètent de son tempérament destructif » : « RoboCop est devenu un modèle pour nos enfants. Nous devons assumer cette responsabilité ». Lorsqu’une psychologue parvenue au sommet de la hiérarchie en couchant avec le PDG propose, lors d’une réunion, de redéfinir « les instructions générales qui détermineront son comportement », les bonnes idées fusent donc : « S’il pouvait un peu plus parler au lieu de se servir de son arme à tout bout de champ ! » lance un premier actionnaire-philanthrope. « Ne pourrait-on faire en sorte qu’il rappelle aux citoyens leur devoir de protéger notre environnement ? » propose un second. « Ne serait-il pas temps de lui enseigner la façon de se faire aimer ? Qu’il visite les orphelinats ! » surenchérit un troisième. « Ce serait formidable ! s’esclaffe le seul dirigeant resté un tant soit peu lucide. Ou qu’il aide les chatons à redescendre des arbres, ou qu’il s’associe aux collectes du dimanche en faveur de la Croix-Rouge, ou même qu’il devienne un animateur de centre aéré et qu’il organise des pique-niques… » « Tout cela est merveilleux. Merci pour toutes ces brillantes idées ! » conclut la psychologue, qui n’a visiblement pas saisi l’ironie de la dernière intervention.
Scène suivante : Une équipe de joueurs de base-ball qui doivent avoir 9 ou 10 ans pille un magasin d’appareils hi-fi, aidée de son coach, qui canarde RoboCop lorsqu’il arrive sur les lieux. « J’aurais deux mots à vous dire ! » lui lance ce dernier en sortant de sa voiture, presque jovial, façon Ned Flanders, avant que sa coéquipière ne tire une balle en plein dans le citron du coach. RoboCop se tourne alors vers les pillards en culottes courtes et leur dit (avec un ton et des gestes que je vous laisse le soin d’imaginer) : « Ah vraiment, que tout ceci est laid ! Peut-être n’avez-vous cherché qu’à vous amuser, mais vous savez que vous faites de la peine à ceux qui vous aiment. Et papa et maman, que vont-ils penser de vous, petites canailles ?... Et maintenant, quelques conseils de nutrition ! » Regard médusé du propriétaire du magasin (que les « petites canailles » ont massacré à coups de batte) et des intéressés eux-mêmes, qui se tirent sans attendre de savoir qu’il leur faut manger cinq fruits et légumes par jour.
Scène suivante : En rentrant au commissariat, RoboCop aperçoit d’autres enfants qui jouent autour d’une bouche incendie ouverte. Il la referme en expliquant, pédagogue : « Notre eau est précieuse. Apprenez donc à l’économiser. Et pierre qui roule vaut deux hommes avertis. » En suivant du regard les mouflets reconnaissants qui décampent en lui criant « Va chier ! », le cyborg devenu roi du dialogue aperçoit un badaud la clope au bec. Il dégaine alors son énorme flingue, tire une vingtaine de balles à quelques centimètres de la tête du vilain pollueur, comme pour en dessiner la silhouette, fait tourner son engin façon cow-boy avant de le rengainer, puis, d’une voix douce : « Merci de ne pas fumer… »
Et ça date de 1990… Mazette !

lundi 15 novembre 2010

Les plus courtes sont les meilleures

Cali, un chanteur engagé...
Tout est dit.

vendredi 12 novembre 2010

Fêtards contre dormeurs

Nuisances sonores dans certains quartiers de Paris...
Les patrons de bar prônent le dialogue et demandent que chacun s'écoute.
C'est un peu la base du problème, non ?

jeudi 11 novembre 2010

Méfaits divers indeed

Je commence à croire que je suis une sorte de chat noir, puisque je viens d'assister, aux premières loges, à deux accidents de voiture en moins de trois heures.
La chose est d'autant plus singulière que ce midi, entre deux bouchées de Parmentier, nous parlions avec C*** du surréaliste « Ne nous fâchons pas » (à quand le smiley ?) qui trône en caractères gras sur la première page des constats. En lisant ce conseil de sage, je m’imagine toujours Ned Flanders sortant de sa voiture emboutie pour lancer un jovial « Sala-sali-salut ! » au chauffard d’en face.
Quoi qu’il en soit, j’ai profité de l’aubaine pour bien observer mes accidentés. Eh bien vous savez quoi ? Ils n’avaient pas dû lire la première page du constat…

Trois plumes au Michelin

Déjeuner chez C*** ce midi. Mémorable Parmentier de canard aux cèpes, arrosé d’un cahors qui, comme dirait mon caviste, était « sur la gourmandise ». C*** m’avait aimablement prévenu que son Parmentier serait, quant à lui, « à la Derrida » (autrement dit, « déconstruit »), ce qui m’a enchanté. Du coup, je lui ai soumis l’idée d’ouvrir une sorte de restaurant littéraire, dont la carte pourrait ressembler à ceci :
Apéritif d’accueil
Perroquet à la Julian Barnes
Entrées
Porto au melon à la Bukowski (possibilité sans melon - à régler d’avance)
ou
Rillettes « bien Grass » façon Günter
ou
Vol-au-vent à la Deforges (d’après une recette originale de Margaret Mitchell)
Plats
Steak tartare à la Stoker
ou
Pilons de Georges Poulet façon genevoise
ou
Daube aux navets du Jardin d’Alexandre (déconseillé par le patron)
Desserts
Saint-Honoré façon Balzac
ou
Pudding à la Modiano
ou
Homi Bhabha au rhum
Pour digérer
Alcools au choix (s’adresser à Guillaume)
ou
Tisane Verlaine-menthe

mercredi 10 novembre 2010

Comme prévu...

Ça y est : Florent Pagny a enfin présenté ses excuses, après son « dérapage raciste » (dixit le CRAN, toujours en grande forme). On savait bien, d’ailleurs, que ce n’était qu’une question d’heures. Alors on attendait, comme ça, pour voir un peu le cirque habituel, les contorsions d’usage, les protestations émues, les preuves de citoyenneté cosmopolite, le jeu du « je-suis-encore-plus-antiraciste-que-vous » – bref : le spectacle du bienpensant progressiste qui se fait dévorer par les siens parce qu’il a eu le malheur de s’oublier une seconde. Mais sans plus d’enthousiasme que ça, à vrai dire. Le scénario est désormais tellement connu, la machine si bien rôdée, que même le comique de répétition ne fonctionne plus.
Pagny avait donc déclaré qu’il avait préféré scolariser ses enfants aux États-Unis, parce qu’en France « il y a un moment où ton môme, il rentre à la maison et d'un seul coup, il se met à parler rebeu... » Il avait aussi fait part d’une conversation qu’il avait eue avec le plus jeune de ses fils : « Ce n'est pas possible : tu ne vas pas pouvoir me parler "çacom", parce que verlan, encore, tout va bien, mais là, il n'y a pas de raison. Tu vas passer à autre chose et tu vas essayer de rattraper le groupe de tête plutôt que de traîner ».
Deux déclarations « nauséabondes » d’un coup, il faut dire qu’il a fait très fort, le Florent ! D’abord, il stigmatise le « parler rebeu » qui est pourtant, comme chacun sait, le détournement toujours inventif, souvent poétique et parfois subversif d’une langue (le français) moisie et sclérosée dans l’assurance de ses préjugés. (Car il est bien évident que « parler rebeu » ne signifie pas littéralement « parler arabe », comme fait semblant de le croire le CRAN. Mais passons.)
Et puis surtout, il dénigre nos belles écoles publiques en envoyant ses rejetons aux « States », ce que font – pas folles – toutes nos « élites » politiques, médiatiques, artistiques et sportives depuis déjà belle lurette, mais en ayant le bon goût de continuer à nous vanter les mérites du riant métissage de nos collèges de ZEP et à nous chanter les louanges de la mixité sociale salvatrice de nos lycées professionnels.
« Mais vous n’aurez pas… ma liberté de penser ! » Bah si. C'était même assez facile, en fait…

mardi 9 novembre 2010

Le quenottier du peuple

En parlant du frangin, voici un extrait délicieux que, Château Yon-Figeac aidant, nous nous remémorions le week-end dernier...
Il y avait de cela, trois années ; pris, au milieu d’une nuit, d’une abominable rage de dents, il se tamponnait la joue, butait contre les meubles, arpentait, semblable à un fou, sa chambre.
C’était une molaire déjà plombée ; aucune guérison n’était possible ; la clef seule des dentistes pouvait remédier au mal. Il attendait, tout enfiévré, le jour, résolu à supporter les plus atroces des opérations, pourvu qu’elles missent fin à ses souffrances.
Tout en se tenant la mâchoire, il se demandait comment faire. Les dentistes qui le soignaient étaient de riches négociants qu’on ne voyait point à sa guise ; il fallait convenir avec eux de visites, d’heures de rendez-vous. C’est inacceptable, je ne puis différer plus longtemps, disait-il ; il se décida à aller chez le premier venu, à courir chez un quenottier du peuple, un de ces gens à poigne de fer qui, s’ils ignorent l’art bien inutile d’ailleurs de panser les caries et d’obturer les trous, savent extirper, avec une rapidité sans pareille, les chicots les plus tenaces ; chez ceux-là, c’est ouvert au petit jour et l’on n’attend pas. Sept heures sonnèrent enfin. Il se précipita hors de chez lui, et se rappelant le nom connu d’un mécanicien qui s’intitulait dentiste populaire et logeait au coin d’un quai, il s’élança dans les rues en mordant son mouchoir, en renfonçant ses larmes.
Arrivé devant la maison, reconnaissable à un immense écriteau de bois noir où le nom de « Gatonax » s’étalait en d’énormes lettres couleur de potiron, et en deux petites armoires vitrées où des dents de pâte étaient soigneusement alignées dans des gencives de cire rose, reliées entre elles par des ressorts mécaniques de laiton, il haleta, la sueur aux tempes ; une transe horrible lui vint, un frisson lui glissa sur la peau, un apaisement eut lieu, la souffrance s’arrêta, la dent se tut.
Il restait, stupide, sur le trottoir ; il s’était enfin roidi contre l’angoisse, avait escaladé un escalier obscur, grimpé quatre à quatre jusqu’au troisième étage. Là, il s’était trouvé devant une porte où une plaque d’émail répétait, inscrit avec des lettres d’un bleu céleste, le nom de l’enseigne. Il avait tiré la sonnette, puis, épouvanté par les larges crachats rouges qu’il apercevait collés sur les marches, il fit volte-face, résolu à souffrir des dents, toute sa vie, quand un cri déchirant perça les cloisons, emplit la cage de l’escalier, le cloua d’horreur, sur place, en même temps qu’une porte s’ouvrit et qu’une vieille femme le pria d’entrer.
La honte l’avait emporté sur la peur ; il avait été introduit dans une salle à manger ; une autre porte avait claqué, donnant passage à un terrible grenadier, vêtu d’une redingote et d’un pantalon noirs, en bois ; des Esseintes le suivit dans une autre pièce.
Ses sensations devenaient, dès ce moment, confuses. Vaguement il se souvenait de s’être affaissé, en face d’une fenêtre, dans un fauteuil, d’avoir balbutié, en mettant un doigt sur sa dent : « elle a déjà été plombée ; j’ai peur qu’il n’y ait rien à faire. »
L’homme avait immédiatement supprimé ces explications, en lui enfonçant un index énorme dans la bouche ; puis, tout en grommelant sous ses moustaches vernies, en crocs, il avait pris un instrument sur une table.
Alors la grande scène avait commencé. Cramponné aux bras du fauteuil, des Esseintes avait senti, dans la joue, du froid, puis ses yeux avaient vu trente-six chandelles et il s’était mis, souffrant des douleurs inouïes, à battre des pieds et à bêler ainsi qu’une bête qu’on assassine.
Un craquement s’était fait entendre, la molaire se cassait, en venant ; il lui avait alors semblé qu’on lui arrachait la tête, qu’on lui fracassait le crâne ; il avait perdu la raison, avait hurlé de toutes ses forces, s’était furieusement défendu contre l’homme qui se ruait de nouveau sur lui comme s’il voulait lui entrer son bras jusqu’au fond du ventre, s’était brusquement reculé d’un pas, et levant le corps attaché à la mâchoire, l’avait laissé brutalement retomber, sur le derrière, dans le fauteuil, tandis que, debout, emplissant la fenêtre, il soufflait, brandissant au bout de son davier, une dent bleue où pendait du rouge !
Anéanti, des Esseintes avait dégobillé du sang plein une cuvette, refusé, d’un geste, à la vieille femme qui rentrait, l’offrande de son chicot qu’elle s’apprêtait à envelopper dans un journal et il avait fui, payant deux francs, lançant, à son tour, des crachats sanglants sur les marches, et il s’était retrouvé, dans la rue, joyeux, rajeuni de dix ans, s’intéressant aux moindres choses.
Joris-Karl Huysmans, À rebours, 1884.

Jeu de massacre


Marc-Edouard Nabe sur fluctuat.net

Entretien réalisé par le frangin...

jeudi 4 novembre 2010

Jaurès et Dreyfus

Les juifs, l’argent, la trahison : avec Dreyfus, s’étend un très vieil antisémitisme qui avait été ragaillardi, et jusque dans les milieux les plus « populaires » et « ouvriers », par les scandales et les crises qui assaillent depuis si longtemps le pays. À gauche aussi, même chez les socialistes déclarés comme chez les militants conscients d’un mouvement ouvrier qui se cherche, il a resurgi sous cette forme instinctivement populiste d’hostilité immédiate et viscérale aux « youtres » manieurs d’argent et usuriers exploiteurs du peuple ; il a relancé l’argumentaire antijuif de tous les anticapitalistes sommaires et, en 1895, il s’est même trouvé des blanquistes notoires pour saluer leurs camarades autrichiens qui chassaient le juif dans Vienne. Séjournant alors brièvement en Algérie, Jaurès lui-même a certes compris que le peuple arabe avait le droit de « surveiller notre gestion » et saurait s’émanciper un jour, mais il a admis étrangement vite que les juifs appliquent là-bas « leurs procédés d’extorsion et d’expropriation », et il n’a guère reproché au jeune « parti socialiste algérien » de prendre âme et élan militant, bel euphémisme, « sous la forme un peu étroite de l’antisémitisme ». On ne l’a certes jamais vu parader, comme certains de ses camarades, avec des antisémites déclarés, même quand il fallut à tout prix aider les verriers d’Albi et que La Libre Parole et Drumont auraient pu être sollicités ; il a toujours tenu pour l’idée, foncière chez lui, qu’il n’y a « qu’une race, qui est l’humanité ». Et il est tout aussi vrai, en revanche, que les premiers dreyfusards ont convaincu et mobilisé des républicains – un petit groupe que Jaurès a défini comme « judaïsant et panamisant » - qui avaient trempé dans le scandale de Panama et étaient restés très hostiles aux socialistes : par exemple, ce Ludovic Trarieux, auteur de l’appel, décisif, dont sortira en juin 1898 la Ligue des droits de l’homme, qui a rapporté sans broncher sur les « lois scélérates » en 1893 et qui, garde des Sceaux en 1895, a directement soutenu Rességuier à Carmaux. Si bien qu’il n’est que trop clair qu’à la différence de Zola, Jaurès n’est pas d’abord devenu dreyfusard par haine de l’antisémitisme. Et pour comprendre qu’il ait si tardivement soutenu Dreyfus, faudrait-il en outre admettre qu’en lui l’intellectuel a été tenu en lisière par le socialiste ? (p. 109-111)
Jean-Pierre Rioux, Jean Jaurès, Perrin, 2005.

Par loteur d'Rnani

Pépite à lire absolument ! Un grand merci à L***.

lundi 1 novembre 2010

MDR ! (Pour de vrai…)


Faut-il y voir un présage ?
Il y a quelques semaines, déjà, cette charmante annonce me faisait comprendre le véritable sens de l’expression « aller s’enterrer dans un trou ».
Aujourd’hui, je débusque par le plus grand hasard ce repaire d’aliénés
Happy Halloween!

dimanche 31 octobre 2010

Parfumier !


Puisqu'on parle de science-fiction...

Sortie dominicale : le dépaysement au coin de la rue

Oubliez le cinéma. De plus en plus, il suffit de sortir de chez soi pour se croire non plus devant mais dans un film de science-fiction. Ainsi, je viens de croiser un jeune quadra en jean-blazer-écharpe, sourire béat, iPhone dégainé, tout occupé à photographier (filmer ?) ses deux mouflets (Mathis et Luna ? Oscar et Emma ? Gabin-Louis et Vélove ?) Que faisaient d’extraordinaire ces deux angelots ? me demanderez-vous. Leurs premiers pas citoyens, vous répondrai-je, puisque, sur la pointe de leur petits petons, langue sortie sous l’effet de la concentration, ils jetaient des bouteilles d’Evian dans la poubelle du recyclage (pardon : la borne de tri sélectif). On peut comprendre l’émotion et la fierté du jeune « papa » devant une telle précocité. Engendrer coup sur coup deux agitateurs du tri, ça vous donnerait presque envie d’embrasser votre prostate.

jeudi 21 octobre 2010

Six pieds sous terre, tu ris encore

Nous parlons en silence
D'une jeunesse vieille.
Nous savons tous les deux
Que le monde sommeille
Par manque d'imprudence.

Acquis social

Mouvements sociaux : Lady Gaga reporte ses concerts parisiens.
Au moins, tout ça aura servi à quelque chose...

lundi 11 octobre 2010

It is called 'The Gorilla' and it is offensive...

Unhappy is he to whom...

Now I ride with the mocking and friendly ghouls on the night-wind, and play by day amongst the catacombs of Nephren-Ka in the sealed and unknown valley of Hadoth by the Nile. I know that light is not for me, save that of the moon over the rock tombs of Neb, nor any gaiety save the unnamed feasts of Nitokris beneath the Great Pyramid; yet in my new wildness and freedom I almost welcome the bitterness of alienage.
For although nepenthe has calmed me, I know always that I am an outsider; a stranger in this century and among those who are still men. This I have known ever since I stretched out my fingers to the abomination within that great gilded frame; stretched out my fingers and touched a cold and unyielding surface of polished glass.
H. P. Lovecraft, "The Outsider", Weird Tales, 1926.

samedi 2 octobre 2010

Une paire de bottes vaut Shakespeare

Coïncidence (ou pas) : quelques minutes avant de lire ces lignes, j’apprenais par la radio que le jeu vidéo PES avait été « le produit culturel le plus vendu en France en 2006 »…
Les héritiers du tiers-mondisme ne sont pas seuls à préconiser la transformation des nations européennes en sociétés multiculturelles. Les prophètes de la postmodernité affichent aujourd’hui le même idéal. Mais tandis que les premiers défendent, face à l’arrogance occidentale, l’égalité de toutes les traditions, c’est pour opposer les vertiges de la fluidité aux vertus de l’enracinement que les seconds généralisent l’emploi d’une notion apparue voici quelques années dans le monde de l’art. L’acteur social postmoderne applique dans sa vie les principes auxquels les architectes et les peintres du même nom se réfèrent dans leur travail : comme eux, il substitue l’éclectisme aux anciennes exclusives ; refusant la brutalité de l’alternative entre académisme et innovation, il mélange souverainement les styles ; au lieu d’être ceci ou cela, classique ou d’avant-garde, bourgeois ou bohème, il marie à sa guise les engouements les plus disparates, les inspirations les plus contradictoires ; léger, mobile, et non raidi dans un credo, figé dans une appartenance, il aime pouvoir passer sans obstacle d’un restaurant chinois à un club antillais, du couscous au cassoulet, du jogging à la religion, ou de la littérature au deltaplane.
S’éclater est le mot d’ordre de ce nouvel hédonisme qui rejette aussi bien la nostalgie que l’auto-accusation. Ses adeptes n’aspirent pas à une société authentique, où tous les individus vivraient bien au chaud dans leur identité culturelle, mais à une société polymorphe, à un monde bigarré qui mettrait toutes les formes de vie à la disposition de chaque individu. Ils prônent moins le droit à la différence que le métissage généralisé, le droit de chacun à la spécificité de l’autre. Multiculturel signifiant pour eux abondamment garni, ce ne sont pas les cultures en tant que telles qu’ils apprécient, mais leur version édulcorée, la part d’elles-mêmes qu’ils peuvent tester, savourer et jeter après usage. Consommateurs et non conservateurs des traditions existantes, c’est le client-roi en eux qui trépigne devant les entraves mises au règne de la diversité par des idéologies vétustes et rigides. (p. 150)
À condition qu’elle porte la signature d’un grand styliste, une paire de bottes vaut Shakespeare. Et tout à l’avenant : une bande dessinée qui combine une intrigue palpitante avec de belles images vaut un roman de Nabokov ; ce que lisent les lolitas vaut Lolita ; un slogan publicitaire efficace vaut un poème d’Apollinaire ou de Francis Ponge ; un rythme de rock vaut une mélodie de Duke Ellington ; un beau match de football vaut un ballet de Pina Bausch ; un grand couturier vaut Manet ; Picasso, Michel-Ange ; l’opéra d’aujourd’hui – « celui de la vie, du clip, du jingle, du spot » (J. Séguéla) – vaut largement Verdi ou Wagner. Le footballeur et le chorégraphe, le peintre et le couturier, l’écrivain et le concepteur, le musicien et le rockeur sont, au même titre, des créateurs. Il faut en finir avec le préjugé scolaire qui réserve cette qualité à certains, et qui plonge les autres dans la sous-culture.
(…)
Vous voilà prévenus : si vous estimez que la confusion mentale n’a jamais protégé personne de la xénophobie ; si vous vous entêtez à maintenir une hiérarchie sévère des valeurs ; si vous réagissez avec intransigeance au triomphe de l’indistinction ; s’il vous est impossible de couvrir de la même étiquette culturelle l’auteur des Essais et un empereur de la télévision, une méditation conçue pour éveiller l’esprit et un spectacle fait pour l’abrutir ; si vous ne voulez pas, quand bien même l’un serait blanc et l’autre noir, mettre un signe d’égalité entre Beethoven et Bob Marley, c’est que vous appartenez – indéfectiblement – au camp des salauds et des peine-à-jouir. Vous êtes un militant de l’ordre moral et votre attitude est trois fois criminelle : puritain, vous vous interdisez tous les plaisirs de l’existence ; despotique, vous fulminez contre ceux qui, ayant rompu avec votre morale du menu unique, ont choisi de vivre à la carte, et vous n’avez qu’un désir : freiner la marche de l’humanité vers l’autonomie ; enfin, vous partagez avec les racistes la phobie du mélange et la pratique de la discrimination : au lieu de l’encourager, vous résistez au métissage. (p. 152-4)
Alain Finkielkraut, La Défaite de la pensée, Gallimard, 1987.

vendredi 1 octobre 2010

Bang Bang

De Nancy Sinatra, j'avoue tout ignorer ou presque. Cela dit, son interprétation de "Bang Bang (My Baby Shot Me Down)", découverte par hasard en regardant Kill Bill, me donne envie d'en entendre davantage...

mercredi 29 septembre 2010

Problèmes d'échange


Rome, le 23 décembre 1903


Mon cher monsieur Kappus,
Il ne faut pas que vous restiez sans un mot de moi alors que Noël approche et que votre solitude, au milieu des fêtes, vous pèsera davantage qu’à l’ordinaire. Mais si vous remarquez alors qu’elle est grande, réjouissez-vous, car que serait une solitude (vous demanderez-vous) qui fût dépourvue de grandeur ? Il n’y a qu’une seule solitude, elle est grande, il n’est pas facile de la supporter, et il arrive à presque tout le monde de vivre des heures qu’on voudrait bien pouvoir échanger contre une quelconque compagnie aussi banale et peu choisie fût-elle, contre un semblant d’accord minime avec le premier venu, avec la personne la plus indigne… Mais sans doute sont-ce là les heures où croît la solitude ; sa croissance, en effet, est douloureuse comme celle de l’enfant, et triste comme le début du printemps. Mais que cela ne vous abuse point. Ce qui est nécessaire, c’est seulement ceci : la solitude, la grande solitude intérieure. Pénétrer en soi-même et ne voir personne durant des heures, voilà ce à quoi il faut être capable de parvenir. Être seul comme on était seul, enfant, lorsque les adultes allaient et venaient, pris dans des affaires qui semblaient importantes et considérables, puisque les grandes personnes avaient l’air très occupées et parce qu’on ne comprenait rien à leurs faits et gestes.
Lorsqu’on s’aperçoit un beau jour que leurs occupations sont piètres, leur métier figé et qu’ils n’ont plus de lien avec la vie, pourquoi ne pas continuer, tel un enfant, à porter là-dessus le même regard que sur ce qui est étranger, d’observer tout cela à partir de la profondeur de notre propre monde, à partir de toute l’ampleur de notre solitude personnelle qui est elle-même travail, situation et métier ? Pourquoi ne pas échanger la non-compréhension intelligente d’un enfant contre le rejet et le mépris, puisque aussi bien ne pas comprendre c’est être seul, tandis que rejeter et mépriser c’est participer à ce dont on veut se séparer par ce biais-là ?
Rainer Maria Rilke, Lettres à un jeune poète, 1903-1908

mardi 28 septembre 2010

Nul n’est prophète en son vin de pays

En promenant ma chienne, il y a quelques instants, j’ai été abordé par un clochard déjà bien madérisé, qui a jugé utile, et même urgent, de me faire les révélations suivantes :
C’est la fin des kebabs raciaux ! Dans cinq ans, poulet juif ou poulet arabe, pffffit ! Ce sera pareil ! À dégager ! C’est comme la voiture : ils ont trouvé encore meilleur que le moteur à essence… Ils appellent ça le « contrat écologique »… Écologique, mon cul ! Ah ah ! Fumiers ! Une bombe atomique sur tout ça ! Eh oui, Monsieur. C’est mon métier… Je te largue une bombe sur tout ça et je t’emmerde !
Après une longue journée, remplie de tracasseries en tous genres, et une inauguration de foire aux vins un peu sordide, je crois que cette rencontre était ce qui pouvait m’arriver de pire. Sans que je parvienne à m’expliquer pourquoi, elle me laisse une immense impression de lassitude. Just one of those days, I guess…

dimanche 19 septembre 2010

Les aventures de « Monsieur Fromage »

De temps à autre, peut-être une fois tous les deux ou trois mois, j’ai droit au coup de fil de « Monsieur Fromage ».
« Monsieur Fromage » est une sorte de sondeur freelance. Il conduit des enquêtes auprès des consommateurs pour diverses sociétés. Je crois que son vrai prénom est Olivier mais je n’en suis plus sûr. Dans la famille, on le surnomme « Monsieur Fromage » parce que quand on l’a connu, il était employé par une boîte spécialisée dans les sondages sur les calendos, bries et autres livarots. C’était à l’époque où il prenait encore la peine de se déplacer un petit peu. Il arrivait toujours plus ou moins à l’improviste, avec sa mallette pleine d’échantillons. Autant dire que quand il l’ouvrait en fin d’après-midi, l’été, après une journée de tapin, on était rapidement mis au parfum, dans tous les sens du terme, et pas toujours les plus agréables. Et puis la boîte a fini par découvrir, en menant ses propres contre-enquêtes par téléphone auprès des personnes que « Monsieur Fromage » était censé avoir sondées, qu’il y mettait quand même pas beaucoup de zèle à faire goûter ses claquos… Parfois même, il s’est trouvé que les gens avaient jamais entendu parler de lui. « Un sondeur en fromages, vous dites ? qui serait passé chez moi ? Mais pas du tout ! » De se rendre compte qu’ils avaient loupé une dégustation à l’œil et qu’en plus on s’était servi à leur insu de leur nom et de leur adresse pour remplir un questionnaire bidon, ça les rendait enragés les gens. Alors il s’est fait virer, « Monsieur Fromage ».
Il a pas eu trop de mal à retrouver du boulot, avec la manie des enquêtes, des tendances, et tout ça. Mais maintenant, il a compris la combine. Bien finies les visites à domicile ! Plus d’emmerdements ! Depuis son canapé, il fait tourner son petit répertoire. Il appelle quelques habituels, bonnes poires dans mon genre, et leur annonce sans chichis la couleur : « Bon, je suis censé être passé chez toi. Je t’ai montré trois projets de publicité. Dis-moi lequel que tu as préféré, comme ça, au hasard. » Ou encore : « Je t’ai cité une liste de marques que tu dois évaluer. Tu leur mets 6/10 à toutes, n’est-ce pas ? » Bien sûr. Si tu le dis. On va pas chipoter pour si peu…
Parfois, c’est plus philosophique, plus profond : « Tu me dis lequel de ces pictogrammes correspond le mieux à ta vision de la vie, entre un petit bonhomme qui sourit, un qui a un air neutre et un qui fait la moue… » Et puis comme ça, sans transition : « Même question pour les pizzas Sodebo . » Faut suivre le fil… C’est pas toujours commode.
Mais que ce soit pour des parapluies ou des assurances, du jambon blanc ou des couches-culottes, faut être honnête, l’affaire est toujours rondement menée. En dix minutes, c’est plié. Juste le temps de me briefer sur mon identité du jour, au cas où ces fumiers de contrôleurs m’appelleraient pour vérifier un peu les bobards, voir si je serais pas par hasard un consommateur fantôme. Une vraie combine d’espion ! « Bon, aujourd’hui tu es un chômeur de 32 ans qui vit encore chez ses parents. » Ou alors : « Tu es chef de famille, tu as 54 ans et trois enfants, sinon tu comprends, ça rentre pas dans mes cases… » Il m’a à la bonne, je crois, « Monsieur Fromage ». Je le contredis jamais.
Je l’aime bien aussi, moi, qui suis pourtant pas friand du téléphone, et encore moins pour les enquêtes d’opinion. En donnant ma bénédiction à ses dingueries, j’ai l’impression de devenir un peu son complice. Je m’imagine qu’on pense déjà tous les deux, hilares, aux publicitaires qui se branleront sur nos statistiques arrangées à la sauce « je t’emmerde » pour créer leur prochaine campagne de pub décalée et anticonformiste… On a les plaisirs qu’on peut.

Troisième sous-sol de l'aveuglement

Comment expliquer l'absence de mixité sociale en France aujourd'hui ? Dans l’émission « On n’est pas couché » du 18 septembre, François Bayrou ose enfin désigner le vrai coupable : « Au XIXe siècle, la mixité, c'était l'escalier, parce que vous aviez au premier étage les gens qui étaient riches, et tout en haut les plus pauvres, parce qu'il n'y avait pas d'ascenseur. D'inventer l'ascenseur, ça a provoqué la situation dans laquelle il n'y a plus eu que les mêmes avec les mêmes... »
Et Zemmour de rétorquer que, comme la plupart des ascenseurs sont cassés dans les tours des « banlieues sensibles », ça ne pose plus vraiment de problème...
C'est toujours ça de pris.

jeudi 16 septembre 2010

Perles thérapeutiques

Entendu ce matin à la pharmacie...
« Vous n'avez pas mal au ventre ?... [Puis, d'un air important] Non, je vous demande ça parce qu'on a fait beaucoup de gastros, cette semaine. »
Trente secondes plus tard, sur le chemin du retour, lu sur la vitrine d'une boulangerie...
Nouveauté ! « La bistouquette de Courteline » !!!
Il y a des jours où l’on préférerait encore faire ses courses chez Leclerc…

mardi 14 septembre 2010

Une idée de con

Ah ! c'est bien terrible quand même... on a beau être jeune quand on s'aperçoit pour le premier coup... comme on perd des gens sur la route... des potes qu'on reverra plus... plus jamais... qu'ils ont disparu comme des songes... que c'est terminé... évanoui... qu'on s'en ira soi-même se perdre aussi... un jour très loin encore... mais forcément... dans tout l'atroce torrent des choses, des gens... des jours... des formes qui passent... qui s'arrêtent jamais... Tous les connards, les pilons, tous les curieux, toute la frimande qui déambule sous les arcades, avec leurs lorgnons, leurs riflards et les petits clebs à la corde... Tout ça, on les reverra plus... Ils passent déjà... Ils sont en rêve avec des autres, ils sont en cheville... ils vont finir... C'est triste vraiment... C'est infâme !... les innocents qui défilent le long des vitrines... Il me montait une envie farouche... j'en tremblais moi de panique d'aller sauter dessus finalement... de me mettre là devant... qu'ils restent pile... Que je les accroche au costard... une idée de con... qu'ils s'arrêtent... qu'ils bougent plus du tout !... Là, qu'ils se fixent !... une bonne fois pour toutes !... Qu'on les voye plus s'en aller.
Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit, 1936.

samedi 11 septembre 2010

Histoire de jaboter...

Sans atiger la cabane, je peux bien dire que la lecture de Calaferte et de Céline, ça finissait par déteindre sur moi… Surtout l’argot. Au début j’entravais que dalle à leur jactance !… J’avais beau relire vingt fois les mêmes phrases, à m’en faire bouillir le cassis, à m’en comburer les châsses… Balle-peau ! Je commençais sérieusement à en avoir tringle… Et puis c’est venu comme ça… Je cherche pas à installer, ni rien. C’est juste un coup à prendre… On m’arrêtait plus ! J’étais passionné !... Sur le page dès le matin que je lisais ! Puis quand je me décidais enfin à décaniller, j’emportais encore mon bouquin aux chiots !... J’en foirais d’aise !... J’étais gras pour la lecture, pas à dire !... À m’en taper des rassis ! À m’en roustir la berloque !...
Seulement, de découvrir les aventures de ces deux fiots-là, faut reconnaître, ça vous rend vite apte à la vachardise… Pour un peu j’allais même plus marner. Faut dire que mes gniards, au tapin, je les piffais de moins en moins… J’en groumais à l’idée d’aller les retrouver… Je pensais plus qu’à licher ! Des kils de ginglard que je me tapais… Et des mominettes par dizaines !... Je me rinçais jusqu’à aller au refile… Je peux dire que je me suis pris de sacrées muffées ! Je dévissais plus du comptoir !... Salopiaud que j’étais !
Alors à force d’aller potasser à la godille, je chocotais un peu à l’idée de rester sur le sable… C’était midi de continuer la belle vie sans gagner sa croûte ! Comme d’habitude, la mouscaille, elle était pour mezig ! Les fafiots, ça poussait pas dans les arbres… Mon morlingue finissait par sentir le moisi… Mes vagues aussi, j’avais beau les retourner !... Serait-ce que pour mes beuveries, fallait bien que je ramène mes flûtes en cours, que je gratte un peu mon plâtre… Alors quand même je me décidais à pouloper jusqu’à l’université, encore titubant, tout boquillonnant… Mais à la seconde où je poussais la lourde, j’avais envie de me trisser !

Au fond dès qu'ils viennent c'est des bavardages !...

Gustin Sabayot, sans lui faire de tort, je peux bien répéter quand même qu’il s’arrachait pas les cheveux à propos des diagnostics. C’est sur les nuages qu’il s’orientait.
En quittant de chez lui il regardait d’abord tout en haut : « Ferdinand, qu’il me faisait, aujourd’hui ça sera sûrement des rhumatismes ! Cent sous !... » Il lisait tout ça dans le ciel. Il se trompait jamais de beaucoup puisqu’il connaissait à fond la température et les tempéraments divers.
« Ah ! voilà un coup de canicule après les fraîcheurs ! Retiens ! C’est du calomel tu peux le dire déjà ! La jaunisse est au fond de l’air ! Le vent a tourné… Nord sur l’Ouest ! Froid sur Averse !... C’est de la bronchite pendant quinze jours ! C’est même pas la peine qu’ils se dépiautent !... Si c’est moi qui commandais, je ferais les ordonnances dans mon lit !... Au fond Ferdinand dès qu’ils viennent c’est des bavardages !... Pour ceux qui en font commerce encore ça s’explique… mais nous autres ?... au Mois ?... À quoi ça rime ?... je les soignerais moi sans les voir tiens les pilons ! D’ici même ! Ils en étoufferont ni plus ni moins ! Ils vomiront pas davantage, ils seront pas moins jaunes, ni moins rouges, ni moins pâles, ni moins cons… C’est la vie !... » Pour avoir raison Gustin, il avait vraiment raison.
« Tu les crois malades ?... Ça gémit… ça rote… ça titube… ça pustule… Tu veux vider ta salle d’attente ? Instantanément ? même de ceux qui s’en étranglent à se ramoner les glaviots ?... Propose un coup de cinéma !... Un apéro gratuit en face !... tu vas voir combien qu’il t’en reste… S’ils viennent te relancer c’est d’abord parce qu’ils s’emmerdent. T’en vois pas un la veille des fêtes… Aux malheureux, retiens mon avis, c’est l’occupation qui manque, c’est pas la santé… Ce qu’ils veulent, c’est que tu les distrayes, les émoustilles, les intrigues avec leurs renvois… leurs gaz… leurs craquements… que tu leur découvres des rapports… des fièvres… des gargouillages… des inédits !... Que tu t’étendes… que tu te passionnes… C’est pour ça que t’as des diplômes… »
Louis-Ferdinand Céline, Mort à crédit, 1936.

dimanche 22 août 2010

On fera des tripes

Tant d’autres avant moi ont cru pouvoir peindre ou écrire et ont enfin compris que ça ne les concernait pas. Se sont mariés depuis. Promènent la poussette avec le gosse dedans les jours de soleil. Ce n’est pas un drame, petit frère. Si, si, c’en est un. Mais passons. Il doit bien y avoir dans le quartier une fille de commerçants pas trop moche en quête d’un foyer stable. Dot à la clef naturellement. Le magasin en héritage, dans longtemps. Une bonne famille connue de tout le monde. Qui a fait les guerres dans la biffe glorieuse. A laissé son cadavre de fils à travers le champ d’honneur, à la boucherie. Méritante, médaillée et votante. Désirerait pour leur tendre progéniture un brave garçon travailleur qu’elle accueillerait à bras ouverts le dimanche à midi, le gâteau au bout des doigts, poulet ou bœuf gros sel sur la table. Père, mère, mémé, aïeuls. Tous attablés dans la salle à manger de l’arrière-boutique rabougrie. Tous unis. Tous contents. Et moi, le petit raté de l’imaginaire, chouchoutant ma grosse poule au sein de la famille comblée. Plus à m’en faire. Peinard. Une belote avec le beau-père, un bouquet à la vieille, un apéro, le soir on reste, on mangerait froids les rogatons, ce serait dix heures au carillon, on bâillerait tous, demain boulot, faudra se lever, alors on se quitte, les embrassades, grand-mère sent l’ail et le vieux pet, couvrez-vous bien, à dimanche prochain, on fera des tripes parce que je les aime, mais non, maman, venez chez nous, c’est votre tour, non, non, venez, c’est pas aux vieux de bouger, alors d’accord, tous à dimanche. Viens vite chérie, il fait pas chaud. Bras dessus bras dessous, notre petit couple dans la rue froide. On poulope jusqu’au métro. On a sommeil. On ne se dit rien. On s’est tout dit dans la journée. Les stations passent. Je suis debout dans le wagon. Ma femme assise dans un coin. Elle n’est ni jolie ni pas jolie. Elle est blonde : depuis avant-hier. C’est tout.
Louis Calaferte, Septentrion, 1984.

Les mésaventures d'Alain de Monéys

- Eh bien, mes amis, que se passe-t-il ?...
- C'est votre cousin, explique un colporteur. Il a crié : « Vive la Prusse ! »
- Quoi ? Mais non ! Allons donc, j'étais auprès et ce n'est pas du tout ce que j'ai entendu. Et puis je connais assez de Maillard pour être bien sûr qu'il est impossible qu'un tel cri sorte de sa bouche : « Vive la Prusse »... Pourquoi pas « À bas la France ! » ?
- Qu'est-ce que vous venez de dire, vous ?
- Quoi ?
- Vous avez dit « À bas la France »...
- Hein ? Mais non !
- Si, vous l'avez dit. Vous avez dit « À bas la France ».
- Mais non, j'ai pas dit ça ! J'ai...
Le colporteur demande aux gens près du muret :
- Que ceux qui l'ont entendu crier « À bas la France » lèvent la main !
Un bras se tend vers le ciel :
- Ah, moi, je l'ai entendu dire « À bas la France »...
D'autres pognes se lèvent, cinq, dix... Des paysans qui n'ont peut-être même pas entendu la question, voyant les autres, lèvent la main à leur tour. Des gens demandent à leur voisin ce qui se passe.
- Il y en a un qui a dit « À bas la France ! ».
Une forêt de bras se dressent pour en témoigner.
- Qui a crié « À bas la France » ?...
- Celui-là.
Jean Teulé, Mangez-le si vous voulez, 2009.

vendredi 16 juillet 2010

"Would you like... a cookie?"

A child, barely five, finishes eating a candy bar. His mother tells him to throw the wrapper away, then resumes talking to another woman, who is with a child around the same age, the three of them staring into the dirty blueness of the penguin habitat. The first child moves toward the trash can, located in a dim corner in the back of the room, that I am now crouching behind. He stands on tiptoes, carefully throwing the wrapper into the trash. I whisper something. The child spots me and just stands there, away from the crowd, slightly scared but also dumbly fascinated. I stare back.
"Would you like… a cookie?" I ask, reaching into my pocket.
He nods his small head, up, then down, slowly, but before he can answer, my sudden lack of care crests in a massive wave of fury and I pull the knife out of my pocket and I stab him, quickly, in the neck.
Bewildered, he backs into the trash can, gurgling like an infant, unable to scream or cry out because of the blood that starts spurting out of the wound in his throat. Though I'd like to watch this child die, I push him down behind the garbage can, then casually mingle in with the rest of the crowd and touch the shoulder of a pretty girl, and smiling I point to a penguin preparing to make a dive. Behind me, if one were to look closely, one could see the child's feet kicking in back of the trash can. I keep an eye on the child's mother, who after a while notices her son's absence and starts scanning the crowd. I touch the girl's shoulder again, and she smiles at me and shrugs apologetically, but I can't figure out why.
When the mother finally notices him she doesn't scream because she can see only his feet and assumes that he's playfully hiding from her. At first she seems relieved that she's spotted him and moving toward the trash can she coos, "Are you playing hide-and-seek, honey?" But from where I stand, behind the pretty girl, who I've already found out is foreign, a tourist, I can see the exact moment when the expression on the mother's face changes into fear, and slinging her purse over her shoulder she pulls the trash can away, revealing a face completely covered in red blood and the child's having trouble blinking its eyes because of this, grabbing at his throat, now kicking weakly. The mother makes a sound that I cannot describe – something high-pitched that turns into screaming.
After she falls to the floor beside the body, a few people turning around, I find myself shouting out, my voice heavy with emotion, "I'm a doctor, move back, I'm a doctor," and I kneel beside the mother before an interested crowd gathers around us and I pry her arms off the child, who is now on his back struggling vainly for breath, the blood coming evenly but in dying arcs out of his neck and onto his Polo shirt, which is drenched with it. And I have a vague awareness during the minutes I hold the child's head, reverently, careful not to bloody myself, that if someone makes a phone call or if a real doctor is at hand, there's a good chance the child can be saved. But this doesn't happen. Instead I hold it, mindlessly, while the mother – homely, Jewishlooking, overweight, pitifully trying to appear stylish in designer jeans and an unsightly leaf-patterned black wool sweater – shrieks do something, do something, do something, the two of us ignoring the chaos, the people who start screaming around us, concentrating only on the dying child.
Though I am satisfied at first by my actions, I'm suddenly jolted with a mournful despair at how useless, how extraordinarily painless, it is to take a child's life. This thing before me, small and twisted and bloody, has no real history, no worthwhile past, nothing is really lost. It's so much worse (and more pleasurable) taking the life of someone who has hit his or her prime, who has the beginnings of a full history, a spouse, a network of friends, a career, whose death will upset far more people whose capacity for grief is limitless than a child's would, perhaps ruin many more lives than just the meaningless, puny death of this boy. I'm automatically seized with an almost overwhelming desire to knife the boy's mother too, who is in hysterics, but all I can do is slap her face harshly and shout for her to calm down. For this I'm given no disapproving looks. I'm dimly aware of light coming into the room, of a door being opened somewhere, of the presence of zoo officials, a security guard, someone – one of the tourists? – taking flash pictures, the penguins freaking out in the tank behind us, slamming themselves against the glass in a panic. A cop pushes me away, even though I tell him I'm a physician. Someone drags the boy outside, lays him on the ground and removes his shirt. The boy gasps, dies. The mother has to be restrained.
I feel empty, hardly here at all, but even the arrival of the police seems an insufficient reason to move and I stand with the crowd outside the penguin habitat, with dozens of others, taking a long time to slowly blend in and then back away, until finally I'm walking down Fifth Avenue, surprised by how little blood has stained my jacket, and I stop in a bookstore and buy a book and then at a Dove Bar stand on the corner of Fiftysixth Street, where I buy a Dove Bar – a coconut one – and I imagine a hole, widening in the sun, and for some reason this breaks the tension I started feeling when I first noticed the snowy owl's eyes and then when it recurred after the boy was dragged out of the penguin habitat and I walked away, my hands soaked with blood, uncaught.
Bret Easton Ellis, American Psycho, 1991.

vendredi 2 juillet 2010

Ah, papito, tu me rends zinzin !

Quelques soirs plus tard, il y a eu une petite fête pour les participants au colloque. À part moi, ils étaient tous profs d'université et ils ne dansaient pas. Des gens sérieux, quoi. Ils ne faisaient que parler et parler. J'avais remarqué l'Africaine au téléphone avec son mari, auparavant. Un cadre militaire important dans leur pays, visiblement. Elle répétait tout le temps : « Oh, honey, I love you. » Par la suite, elle m'a montré une photo de ses trois enfants et de son mec en uniforme de parade, et elle très jolie en habit traditionnel... Toujours est-il qu'elle a abusé du vin, ce soir-là. On a bu quelques verres ensemble. À un moment, elle est venue à moi avec le plus doux sourire qui soit et elle m'a entraîné sur la piste de danse. Je n'avais pas envie de ça, moi. Elle me serrait contre elle, me caressait le dos, me disait dans l'oreille : « Ooh, very nice, very nice. Ooh, really very nice. » J'ai le dos très sensible, moi. J'ai plaqué mes mains sur cet énorme, splendide cul africain, et cinq minutes plus tard on était dans ma chambre, à l'étage au-dessus. Ça a été grandiose. Ses cheveux sentaient le sale. Elle avait de petites tresses qui n'avaient pas été défaites depuis Dieu sait quand, très mignonnes avec leurs boules de couleur mais vraiment puantes, alors je me suis concentré sur d'autres régions de son anatomie. Dehors il faisait à peine plus que zéro mais on suait et on suait, nous deux. Elle était fantastique, incroyablement souple, et elle levait les jambes à l'azimut. J'avais la tête fourrée là-dedans quand elle a lâché deux pets bien sonores. Je la besognais avec la langue et j'ai senti les deux jets d'air sous pression m'atteindre au front. J'ai risqué un coup d'oeil. Pas de merde. Okay. En avant. Elle était très agitée, elle. Elle me prenait la bite dans les mains. Elle la voulait. Moi, j'avais le préservatif déjà prêt. Je me suis couvert et j'ai plongé dans la jungle noire. Inoubliable. Très folklorique, tout ça. Il était quatre heures du matin ou presque lorsqu'elle est retournée prudemment à sa chambre. Moi, je suis descendu boire un peu de thé et me fumer un bon cigare. Il y avait encore quelqu'un par là. Un Vietnamien homo allongé sur un canapé, en train de regarder la chaîne Playboy à la télé. Une couverture tirée sur lui. Par en dessous, sa main s'activait dur. Branlette vietcong dans l'aube scandinave. On fait ce qu'on peut.
Le lendemain, j'ai essayé de remettre le couvert mais l'Africaine gardait les yeux au sol. Sans oser me regarder, elle a murmuré : « Sorry. Too much wine yesterday night. Sorry. »
J'ai voulu jouer le latin lover. Je lui ai dit que ça avait été super, qu'elle n'avait pas à regretter, que rien n'était plus naturel entre un homme et une femme qui se plaisent. Des idioties de ce genre. Mais elle ne s'est pas laissé convaincre. Les jours suivants, elle m'a évité. Alors j'ai demandé au Vietnamien gay à quelle heure passaient les meilleurs films, sur la chaîne de Playboy.
Pedro Juan Guttiérez, Animal tropical, 2000.

mercredi 30 juin 2010

Au temps pour moi

"Les soldes d'été sont un temps fort du Printemps."

jeudi 24 juin 2010

STRIP TISSS !!!...

C'était un bar, et il ne semblait pas très prometteur. Des types seuls assis au comptoir, l'air de s'ennuyer ferme, des putes sur le retour. La voix de Julio Iglesias s'échappait tel un petit flot poisseux de hauts-parleurs dissimulés. Ángela éveilla des regards lascifs chez de gros hommes qui buvaient et fumaient assis à de petites tables à lampes accompagnés par des filles qui elles aussi avaient l'air de s'ennuyer ferme dans la pénombre mauve.
- Écoute, Escobar : Julio Iglesias.
- Oui, nous sommes au septième cercle de l'enfer.
Ils s'assirent dans l'obscurité du fond et commandèrent des whiskies. Ils allaient finir complètement ivres, accoudés au comptoir, l'air de s'ennuyer ferme. Julio Iglesias fut coupé en plein milieu de sa chanson sirupeuse, et une voix enthousiaste surgit des hauts-parleurs :
- Et maintenant, messieurs ! An nao, yéntlemen ! Le Septième Cercle a le plaisir de vous présenter ! Di Seven Circl is api tou prisent ! L'unique ! Di onli ! Le meilleur ! Di best! L'authentique ! Di autentic ! STRIP TISSS !!!... Avec les plus belles filles ! Di moust biutiful guerls ! de la nuit de Bogotá ! of di nait of Bogotá ! L'Athènes ! Di Athenas ! Sud-américaine ! of Sauz America !
On entendit un roulement de tambour, puis les premières notes de La Marseillaise. Les rideaux argentés d'une scène minuscule, au fond de la piste de danse, s'ouvrirent en bringuebalant. Il y eut quelques applaudissements aux tables. Des lumières de couleur s'allumèrent, et une fille jeune, vêtue de voiles de mousseline et portant des bracelets de métal entra en scène en clignant les yeux sous les projecteurs.
- Cléopâtre, reine de Babylone ! Cleopatra, cuine of Babilonia ! annonça le haut-parleur.
Et une musique orientale s'éleva aussitôt. Cléopâtre fit serpenter ses bras, ébaucha des pas de danse. Une esclave noire enchaînée commença à la dépouiller de ses voiles au rythme de la musique. Quand elle fut nue avec un petit cœur de lamé doré juste au milieu du sexe, la musique se tut. Les deux femmes saluèrent dans les bouffées douceâtres de sueur et de maquillage et reçurent des applaudissements diffus. Puis ce fut le tour de Rosita, la Collégienne - litl Ros, di scoulguerl -, fausse blonde à nattes portant un cartable plein de livres, vêtue d'une jupe à carreaux et de socquettes. Elle se déshabilla en se déhanchant et ne garda qu'un petit cœur rose sur le sexe.
- Pauvres gamines... ! commenta Ángela.
- C'est la nuit de Bogotá, expliqua Escobar en essayant de l'embrasser.
Ce fut alors le tour de Pascale, la Petite Française - Pascale, di litl French -, qui avait des seins énormes. Puis, de nouveau, l'esclave du premier numéro, sauf que cette fois elle était Irina, la femme panthère, et qu'on l'avait amenée dans une cage où elle grognait et tournait à quatre pattes sur une musique de cirque. Le numéro suivant s'appelait "La Consultation", di chek-ap : Cléopâtre, habillée en docteur, auscultait les seins de la petite Française avec un stéthoscope et finissait en faisant semblant de la violer sur une table d'opération rudimentaire. Et dans celui d'après - "Les Amies", De Gud Frends -, la Noire et la fausse blonde se caressaient et s'embrassaient sur la même table, couverte maintenant d'oreillers et de coussins de satin. Puis les rideaux de la scène se refermèrent définitivement, et Julio Iglesias se remit à chanter.
Antonio Caballero, Un mal sans remède, 2004.

lundi 21 juin 2010

Fugue en sol clément

Ce soir, c'est la fête de la musique.
Cette année, le thème en est "la musique au féminin".
Si vous voyez deux meilleures raisons pour s'éclipser à la campagne, faites-moi signe à mon retour.

dimanche 20 juin 2010

L’équipe de France n’a jamais été aussi représentative du « vivre-ensemble »

La déconfiture de l’équipe de France de football face au Mexique constituait déjà un spectacle des plus réjouissants, tant il est vrai que les joueurs qui la composent ont le don de susciter l’antipathie. Constantes gueules d’enterrement, caprices d’enfants gâtés, postures de stars, barbotage satisfait dans la vulgarité des pubs, mépris du public, incompétence notoire : les raisons ne manquaient certes pas de vomir ces drôles-là, pas même foutus de choisir une catin avec goût ni de se la farcir sans que cela ne se sache (ce qui, quand on connaît leurs salaires, relève tout de même de l’exploit…)
Mais l’« affaire Anelka », là, il faut avouer que c’est carrément du caviar ! Résumons-nous. Il y a encore 48 heures, il était donc permis de mépriser de toute son âme l’équipe tricolore – ce dont bon nombre de Français, qu’ils soient ou non amateurs de foot, ne se privaient d’ailleurs pas – mais il était en revanche jugé tout à fait inopportun (pour ne pas dire « nauséabond ») de ne pas s’y reconnaître. Pas le moindre paradoxe là-dedans, à ce qu’il paraît. « On a tous un côté bleu », martelaient les sponsors. Méthode Coué…
Or, aujourd’hui, virage spectaculaire ! On semble tomber des nues. Un joueur mercenaire qui se contrefout manifestement du pays qu’il est censé représenter, qui traite son entraîneur de fils de pute et lui dit d’aller se faire enculer, voilà qui n’est, soudain, « pas la France ». Les journalistes ne ménagent d’ailleurs pas leur peine pour tenter de nous en convaincre : à la radio comme à la télé s’enchaînent, telles des cérémonies d’exorcisme, les interviews de jeunes joueurs de foot « des quartiers » – blacks, blancs, beurs, comme en 98 – dénonçant sagement l’attitude d’Anelka. Et tant pis si, au même moment, Sydney Govou fait des déclarations fort intéressantes (mais bizarrement peu relayées) à un journaliste de L’Équipe lui demandant s’il n’existerait pas, tout de même, des « clans » parmi les Bleus (fallait-il que ça saute aux yeux pour que le pauvre diable ose poser la question !) : « Dans la vie de tous les jours, on cherche des affinités, alors en équipe de France aussi. Et quand on cherche des affinités, la couleur, c’est la première chose qui vient à l’esprit. » De fait, l’équipe de France n’a jamais été aussi représentative qu’à cet instant précis où il devient, comme par hasard, interdit de s’y reconnaître. Elle illustre à merveille ce que toute personne un tant soit peu en contact avec le réel sait depuis longtemps déjà – à savoir que le « vivre-ensemble » est un mythe.
Mais tout cela a peu d’importance. L’essentiel n’est-il pas d’« éliminer le traître » qui a balancé le caïd, comme l’a dit Patrice Evra, le parrain – pardon, le capitaine – de cette belle équipe ? Bien sûr que si. C’est la loi de la rue, mon frère. M’est avis que c’est Gourcuff qui va prendre, « coupable » ou pas. Une vague intuition…

samedi 19 juin 2010

Pour mémoire

Je sais bien que - quelle que soit sa valeur - aucune oeuvre n'a jamais été ni ne sera jamais le reflet de son époque, pour la bonne et simple raison que, précisément, elle en fait partie et ne saurait donc en être extraite pour se tenir face à elle, à la manière d'un miroir. Ainsi, s'il est toujours possible - et, à vrai dire, enivrant - de réfléchir une époque à travers une oeuvre (et même d'en réfléchir deux : la nôtre et la sienne), il me semble en revanche illusoire de penser qu'une oeuvre puisse réfléchir une époque.
Il n'en demeure pas moins que si, dans 1000 ans, il venait à un historien l'idée saugrenue de résumer notre époque, par le biais d'un document qui en condenserait les traits les plus saillants, c'est probablement par ici qu'il faudrait que ce farfelu se tourne...

vendredi 18 juin 2010

Common as dirt

Here a year or two back me and Loretta went to a conference in Corpus Christi and I got set next to this woman, she was the wife of somebody or other. And she kept talkin about the right wing this and the right wing that. I aint even sure what she meant by it. The people I know are mostly just common people. Common as dirt, as the sayin goes. I told her that and she looked at me funny. She thought I was sayin somethin bad about em, but of course that's a high compliment in my part of the world. She kept on, kept on. Finally told me, said: I dont like the way this country is headed. I want my granddaughter to be able to have an abortion. And I said well mam I dont think you got any worries about the way the country is headed. The way I see it goin I dont have much doubt but what she'll be able to have an abortion. I'm goin to say that not only will she be able to have an abortion, she'll be able to have you put to sleep. Which pretty much ended the conversation.
Cormac McCarthy, No Country for Old Men, 2005.

lundi 14 juin 2010

Tout est dans tout


L'escroquerie sociologique résumée en un schéma...

dimanche 6 juin 2010

That was it

That was it; that was all. But they stand there for awhile longer, feeling the power that is in their circle, the closed body that they make. The light paints their faces in pale fading colors; the sun is now gone and sunset is dying. They stand together in a circle as the darkness creeps down into the Barrens, filling up the paths they have walked this summer, the clearings where they have played tag and guns, the secret places along the riverbanks where they have sat and discussed childhood's long questions or smoked Beverly's cigarettes or where they have merely been silent, watching the passage of the clouds reflected in the water. The eye of the day is closing.
At last Ben drops his hands. He starts to say something, shakes his head, and walks away. Richie follows him, then Beverly and Mike, walking together. No one talks; they climb the embankment to Kansas Street and simply take leave of one another. And when Bill thinks it over twenty-seven years later, he realizes that they really never did all get together again. Four of them quite often, sometimes five, and maybe six once or twice. But never all seven.
He's the last to go. He stands for a long time with his hands on the rickety white fence, looking down into the Barrens as, overhead, the first stars seed the summer sky. He stands under the blue and over the black and watches the Barrens fill up with darkness.
I never want to play down there again, he thinks suddenly and is amazed to find the thought is not terrible or distressing but tremendously liberating.
He stands there a moment longer and then turns away from the Barrens and starts home, walking along the dark sidewalk with his hands in his pockets, glancing from time to time at the houses of Derry, warmly lit against the night.
After a block or two he begins to walk faster, thinking of supper… and a block or two after that, he begins to whistle.
Stephen King, It, 1986

samedi 22 mai 2010

Préjugés en série

Je viens d'apprendre, en écoutant la radio, que la plupart des tueurs en série étaient des hommes blancs âgés de 25 à 50 ans et bien intégrés professionnellement.
Je suis un homme. Je suis blanc. J'ai entre 25 et 50 ans. Je suis bien intégré professionnellement... Et pourtant, je ne suis pas un tueur en série. Vous imaginez donc sans peine à quel point je me sens stigmatisé.
Mais je me console : SOS Racisme ne devrait plus tarder à publier un communiqué pour s'insurger contre ce dérapage nauséabond.
J'attends...

dimanche 9 mai 2010

Sans Nicolas Cage (as Fu Manchu)

Ecrivez un scénario qui soit un hommage très appuyé à la série des Evil Dead ; ajoutez un peu de l'ambiance de The Thing, de La Nuit des morts-vivants et de Shaun of the Dead ; puis saupoudrez le tout de références à Indiana Jones, Terminator, Braindead et Vendredi 13 ; et vous obtenez... un film raté.

Allez comprendre...

jeudi 29 avril 2010

Question de confiance

Les confidents les plus fiables sont ceux qui se foutent de ce que vous leur racontez.

dimanche 25 avril 2010

Ames féministes s'abstenir

[P]lus l'homme, par sa pratique, prend conscience de la fille (au sens de pauvre fille, méchante fille, fille de joie) que lui cachait sa mère, plus son respect a priori de la femme s'abaisse au niveau des femmes réelles, dont il découvre l'ambivalence, voire la duplicité.
Pour être encore plus clair :
le pouvoir de la femme est d'abord celui que l'homme lui donne en se trompant un peu sur elle ; et le moins qu'un homme d'expérience puisse affirmer c'est que les femmes ont, en moyenne, plus à perdre qu'à gagner à être mieux connues.
Les séductrices et autres femmes malignes ont si bien compris cet intérêt de rester magiques au coeur de l'homme, qu'elles s'ingénient par tout un tas d'astuces (appelées séduction) à demeurer dans l'inexplicable et l'inexpliqué. Evoquant l'éternel féminin chaque fois qu'on voudrait les engager sur le terrain glissant du concept et de la transparence. Préférant intriguer plutôt que de dévoiler bêtement la platitude ou la bassesse de leurs aspirations. (pp. 78-9)
Sur le plan de la pensée, le féminisme culturel a apporté deux choses : le féminisme et un goût certain pour la psychanalyse.
Expliquant tout par l'amour limité à la recherche du plaisir et à la séduction, la psychanalyse, comme la femme, ne sort pas de l'oedipe ; elles étaient donc faites pour se rencontrer.
Mais le système freudien exigeant quand même l'apprentissage et la maîtrise d'un subtil appareillage conceptuel, le goût des femmes pour la pensée magique et sa médiatisation par les magazines féminins ont tôt fait de réduire la théorie psychanalytique à un psychologisme de bazar, prétexte à tous les conseils psy.
Après avoir exprimé le droit consumériste au plaisir de l'époque de la croissance (de la pilule au premier choc pétrolier), le conseil psy s'est peu à peu radicalisé en une sordide surenchère au plaisir pour faire face à la crise de la consommation (qui est aussi celle du désir).
Tournant de plus en plus au guide pratique sur le bon usage de la sodomie et les techniques de fellation, il reflète aujourd'hui l'extrême détresse de pétasses en fin de parcours, devenues prêtes à tout pour se faire tirer. (pp. 94-5)
Alain Soral, Vers la féminisation ?, Editions Blanche, 1999.

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