Je dirais même plus...

samedi 23 mai 2009

Not as a dodo


Marley was dead, to begin with. There is no doubt whatever about that. The register of his burial was signed by the clergyman, the clerk, the undertaker, and the chief mourner. Scrooge signed it. And Scrooge's name was good upon 'Change, for anything he chose to put his hand to.
Old Marley was as dead as a door-nail.
Mind! I don't mean to say that I know, of my own knowledge, what there is particularly dead about a door-nail. I might have been inclined, myself, to regard a coffin-nail as the deadest piece of ironmongery in the trade. But the wisdom of our ancestors is in the simile; and my unhallowed hands shall not disturb it, or the Country's done for. You will therefore permit me to repeat, emphatically, that Marley was as dead as a door-nail.
Scrooge knew he was dead? Of course he did. How could it be otherwise? Scrooge and he were partners for I don't know how many years. Scrooge was his sole executor, his sole administrator, his sole assign, his sole residuary legatee, his sole friend and sole mourner. And even Scrooge was not so dreadfully cut up by the sad event, but that he was an excellent man of business on the very day of the funeral, and solemnised it with an undoubted bargain.
The mention of Marley's funeral brings me back to the point I started from. There is no doubt that Marley was dead. This must be distinctly understood, or nothing wonderful can come of the story I am going to relate. If we were not perfectly convinced that Hamlet's father died before the play began, there would be nothing more remarkable in his taking a stroll at night, in an easterly wind, upon his own ramparts, than there would be in any other middle-aged gentleman rashly turning out after dark in a breezy spot – say Saint Paul's Churchyard for instance – literally to astonish his son's weak mind.
Charles Dickens, A Christmas Carol, 1843

jeudi 21 mai 2009

Colloquial advice

M***, amie thésarde, s’inquiète de ne pas avoir suffisamment de temps pour soumettre une proposition de communication à un colloque. En réalité, on a toujours assez de temps pour ce genre de bluff. D’expérience, je puis même affirmer que c’est souvent dans l’urgence que les traits d’inspiration les mieux sentis (phrases en chiasme, jeux de mots et paradoxes soi-disant profonds, portes ouvertes enfoncées sous le masque de l’originalité…) viennent avec le plus de facilité. L’instinct de survie, probablement.

Non, le plus dur, c’est bien entendu de poursuivre l’escroquerie une fois sur place ; autrement dit de savoir dissimuler avec élégance le fossé béant qui ne manque jamais de séparer ladite proposition de la communication finalement pondue, l’élan lyrique prometteur de l’inavouable réalité.

Trois petites astuces de base pour y parvenir à peu de frais :

1) En guise de préambule, affectez l’enthousiasme en expliquant que, certes, vous étiez initialement parti(e) sur la piste évoquée dans le programme du colloque, mais que vos recherches vous ont peu à peu amené(e) à bifurquer vers une question à votre sens plus fondamentale encore (comprenez : les trois morceaux de phrase que vous avez griffonnés la veille au soir dans votre chambre d’hôtel). Insistez sur le fait que vous n’êtes pas responsable de ce changement de dernière minute, mais qu’il s’est imposé à vous, le sacripant. Par honnêteté intellectuelle, vous ne pouviez pas l’ignorer et choisir la facilité. Au besoin, illustrez votre agacement imaginaire d’une petite moue. Concluez cependant d’un air bienveillant et fataliste : « This subject is so vast and so complex, but on the other hand it’s so fascinating ! »
Autre avantage de cette stratégie : pour des raisons de temps, que chacun comprendra, ces confidences méta-méthodologiques tiendront lieu d’introduction à votre intervention et vous dispenseront donc d’en rédiger une vraie.

2) Plus prosaïque mais tout aussi efficace : abrutissez votre auditoire d’un florilège de « visual aids » fantaisistes : citations latines, portraits de personnages illustres (Churchill, Nelson, Noddy…), schémas, diagrammes, photos de cul, tout est bon à prendre ! Il s’agit avant tout de détourner l’attention générale des fadaises que vous êtes en train de débiter.

3) Si vos fariboles ne dépassent pas les 3 minutes au chrono, découvrez-vous un chat dans la gorge et buvez abondamment. Pour plus de réalisme, nous vous conseillons de préparer le terrain environ une heure à l’avance, en poussant des râles de moribond pendant les communications qui précèdent la vôtre. Pour marquer le coup, sortez ostensiblement de l’amphi. Sous prétexte de ne pas déranger plus longtemps vos congénères par vos expectorations, vous pourrez ainsi aller vous en griller une avant que ne vienne votre tour. Ne simulez le malaise cardiaque ou l’AVC qu’en dernier recours.

Dans la prochaine leçon, nous verrons comment répondre aux questions qui suivent votre communication.

Rester soi-même

« Je suis un type tout à fait normal, comme vous et moi… »

mercredi 20 mai 2009

D'humeur gore


Le premier qui me cherche aujourd'hui...

dimanche 17 mai 2009

Sans titre

Cette balade dominicale s’annonçait pourtant sous les meilleurs auspices. Les bords de Loire par temps gris avec mon chien. C’était sans compter sur la présence en ces lieux d’un de ces « artistes du quotidien » dont notre époque a le secret. Un vrai de vrai, hein ! Pas du chiqué. Au programme, dolmens bariolés en plastique posés au bord du chemin, photocopies de portraits divers agrafées aux arbres, chaises bleues disposées en cercle les pieds dans l’eau. Et les promeneurs – pardon, le public – nullement choqué par cette pollution visuelle manifeste (à l’heure où l’écologie est pourtant reine). Ravi, même, de déambuler parmi ces horreurs et de faire d’une pierre deux coups : s’aérer et se cultiver. Café chaud offert en prime. Qui dit mieux ? Les Parisiens ont bien leurs pubs dans le métro ; pourquoi la Province n’aurait-elle pas droit à ses expositions in situ ? Égalité.

Pendant que mon toutou prenait un malin plaisir à chier à deux pas d’un totem sordide (il ne leur manque que la parole…), je m’imaginais le « flyer » qui aurait pu (et même dû) accompagner cette manifestation « bon enfant » :

Sensible au métissage des lieux et des couleurs, Urbain Labita investit les bords de la Loire où il explore avec finesse les notions de nature et de culture, d’extérieur et d’intérieur, de dit et de non-dit. « Mon but est avant tout de surprendre le spectateur, voire de le déranger, affirme-t-il non sans audace. Je veux tendre à mes semblables un miroir sans complaisance et dresser un portrait chirurgical de notre société de consommation ». Mais s’il joue avec l’art, c’est aussi pour mieux s’en jouer et le déjouer. « Je veux dédramatiser l’art ; le mettre à la portée du public ». De fait, c’est en circulant au milieu des œuvres, dont ils seront comme les respirations, que les spectateurs leur donneront un sens – le leur – et se réapproprieront leurs lieux de vie quotidienne. Café offert.

lundi 11 mai 2009

Muray, II


Ça pourrait être cela, en fin de compte, le propre de la critique : repérer ce qui tend à rendre le roman impossible. Il y a donc la poétification de la réalité. Et aussi, en vrac : l’interdiction de se moquer ou de caricaturer (tout le monde est respectable) ; la victimocratie ; le primat des larmes et de l’émotion, mélange radioactif de résidus de gauchisme et de puritanisme ; le terrorisme du cœur ; le chantage au moi comme authenticité, comme preuve (et finalement comme œuvre : « Il me suffit d’exhiber mes blessures et d’appeler ça de l’art. Reconnaissez mes blessures comme de l’art et taisez-vous ! ») (…) ; la confusion organisée des sexes (alors qu’un bon romancier est toujours un très ferme différenciateur des sexes) ; la propagande homophile acceptée lâchement comme style de vie général (« On est tous un peu homos ») ; le devenir nursery-monde du monde, l’infantilisation généralisée (devant « l’intérêt de l’enfant », qui oserait ne pas s’agenouiller ?) (…) ; le modèle du racisme à toutes les sauces (invention du « sexisme » sur le moule du racisme, fabrication plus récente du « spécisme », crime consistant à voir une distinction entre les espèces)… (« Le propre de la critique », p. 5)

Chaque anniversaire, cinquantième, centième ou cinq centième, est le début d’une sorte de curée. D’une émeute douce. D’une espèce de jacquerie revancharde contre les seigneurs de l’ancien temps, contre les maîtres des vieux châteaux de la beauté, de l’harmonie et de l’intelligence. Chaque célébration est le signal d’une compensation, d’une récupération de ce qui est censé avoir été volé aux masses. Tout commémoré, aussi, est un accusé en puissance. On est en droit d’exiger de lui, de façon posthume, une réparation, des dommages et intérêts, ne serait-ce que pour s’être illustré, jadis, à titre personnel. Le grand art du passé était une forme d’accaparement que nous ne pourrions plus tolérer si, par extraordinaire, il se manifestait de nouveau. Les plus bruyantes gesticulations commémoratives ne veulent rien exprimer d’autre que ce que l’on disait naguère de la propriété : « Le génie, c’est le vol ! » La même affirmation, le même mot d’ordre résonne à travers toutes les manifestations du Tourisme, qui est l’autre nom de la Culture. Quand le commémoré s’y prête, les commémorateurs enrôlent les foules commémorantes dans des week-ends à thèmes et des symposiums ambulants où c’est d’abord le rituel touristique de la réappropriation de masse qui est célébré (ce que les tours-opérateurs culturels appellent « restitution au public » des sites injustement confisqués. (« Rabelais à Rabelaisland », pp. 44-5)

La Comédie humaine ne se complaît nullement dans sa propre noirceur. Elle est tournée vers le rire comme vers une extériorité bienfaisante, un « monde extérieur », un ailleurs respirable. Vers ce qui empêche le roman de se retrouver transformé en succursale de clinique humanitaire, hospice compassionnel, laboratoire de chirurgie esthétique, poétique et miséricordieuse. (« Un passeport pour la pensée (Balzac) », p. 105)

Madame Bovary aux postes de commande, c’est le ministre de la Culture, de la Vie et du Bonheur réunis. Parti des utopies de rupture intégrale, l’Avant-gardiste termine sa course dans l’adhésion intégrale sans avoir eu à renier le moins du monde ses idéaux « subversifs », qui s’accordent si harmonieusement, désormais, avec la « réhabilitation » de la France et les aspirations des nouvelles classes moyennes, soucieuses de leur bien-être, avides de « changement » et de standing culturel. La récupération étatique des formes les plus ravagées, leur exhibition comme valeurs positives, sont le pain quotidien du Novateur promu. Rien n’exprime mieux, de nos jours, les sentiments majoritaires et consensuels que l’éloge de la « modernité », mariée en secondes noces avec la propagande publicitaire et le business, tout en gardant à travers les décennies une petite coloration « critique » du meilleur effet. (« Portrait de l'avant-gardiste », p. 221)
Philippe Muray, Exorcismes spirituels I, 1997

mardi 5 mai 2009

L'étalon italien

- Tiens, hier soir j'ai regardé Rocco et ses frères.
- Sans rire ? Tu t'es fait un porno ?