On ne peut qu'être frappé par le fait que les acteurs et les comédiens, qui comptent aujourd'hui parmi les notables les plus gras de notre société et en sont, pour beaucoup, le plus médiocre reflet (puisque le septième art n'a lui-même plus d'autre ambition que de "refleter les problématiques qui sont les nôtres") ; on ne peut qu'être frappé, donc, par le fait que ces sinistres farceurs n'aient de cesse de se déclarer de "distants observateurs" de leur époque, dans le conformisme de laquelle ils sont pourtant englués de toute leur âme, et qu'ils soient les plus prompts à dégainer la ritournelle - inoffensive, il est vrai - de l'anticonformisme.
Ainsi, rien n'est plus distrayant que d'entendre ces faquins évoquer avec la fatuité la plus outrée (mais sans déclencher le moindre sourire) les chefs-d'oeuvre "engagés" et "décalés" auxquels ils ont eu "l'immense privilège" de participer. Il faut souligner, à leur décharge, que les préposés en promotion qui les reçoivent pour écouter complaisamment leur babil leur mâchent grandement le travail. "Ce film, ça a été une vraie aventure humaine ?" et "Pour ce rôle, vous vous êtes vraiment mis en danger ?" semblent être devenues deux des questions incontournables de ces autres bouffons sincères que l'on nomme journalistes. La mousse est prête : il n'y a plus qu'à s'en enduire. Et à enchaîner sur le statut toujours précaire, "sur le fil" - mais par là même noble - de l'acteur. Le mot "acteur", du reste, est déjà de trop si l'on en croit les principaux intéressés : "Je ne suis qu'un saltimbanque, un marginal, affirment-ils sans broncher, tout potelés de leurs succès et roses de leur satisfaction. Je suis un héritier de Molière, iconoclaste dérangeant enterré dans la fosse commune (car Poquelin est aujourd'hui à l'artiste ce que Hitler est à l'anti-raciste). Je ne suis qu'un clown triste". Pour le coup, ils ne pensent pas si bien dire. C'est sûrement cela que l'on appelle l'ironie dramatique.
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