C’est plus fort qu’elle. Quand la gauche se ridiculise, ce qui devient une fâcheuse habitude, la droite – compatissante – ne peut se résoudre à la laisser se noyer seule et plonge donc à son tour, tête baissée. C’est presque une forme de courtoisie, un aveu de dette (« C’est le moins qu’on puisse faire… ») Et d’envoyer, par exemple, l’impayable Fadela Amara au 20 Heures de France 2, lundi 13 juin, pour commenter l’affaire Orelsan. Amis du parler-cash, accrochez-vous bien à vos slips…
NB : Je précise, pour les optimisto-sceptiques, que ma transcription est fidèle au mot près. Ceux qui liront ce billet suffisamment tôt pourront s’en convaincre en allant sur le site de France 2, où les JT sont archivés huit jours. C’est en pensant à tous les autres, malchanceux, que j’ai pris mon courage à deux doigts.
- Fadela Amara, les festivals ont raison d’être sur la réserve, de refuser cet artiste, ou bien est-ce que la liberté de création doit primer sur tout ?
- Écoutez je vais peut-être vous étonner mais moi je suis très très attachée à la liberté d’expression… mais je comprends parfaitement les organisations féministes ont eu raison de contester, nous sommes dans une démocratie, elles ont le droit de s’exprimer. C’est vrai que on mesure pas mais la chanson d’Orelsan – le rappeur, donc – est une chanson dans laquelle on parle des femmes mais d’une manière extrêmement abjecte. Quand on a dit ça, en réalite, on n’a pas dit grand-chose, pasque la vérite c’est que on est dans une posture artistique et je pense que on est dans des sujets qui prêtent à polémique. On est aussi dans une instrumentalisation politique pasque j’ai cru comprendre qu’y’a des pressions à la subvention qui sont faites…
- Là vous parlez de Ségolène Royal, la présidente de la région, qui avait dit : « Si vous programmez cet artiste, la subvention disparaîtra ». Elle n’a pas encore réagi, là-dessus, Ségolène Royal.
- Oui, moi je trouve que – si c’est vrai – je trouve que c’est grave, et puis de toute manière ça a pas lieu d’être dans notre pays. C’qui est intéressant en réalite c’est que le milieu du rap en réalite a très mauvaise presse globalement, pasque ce sont surtout des chanteurs qui revendiquent un certain ensemble de choses mais ils le revendiquent d’une certaine manière qui peut aussi, j’dirais, hérisser le poil – sinon plus – à beaucoup d’entre nous.
- Alors vous voulez les réunir. Pourquoi ?
- Moi j’ai souhaité les réunir autour d’une table ronde, mais ça date pas d’aujourd’hui, hein, ça date d’un bout de temps, y compris quand j’étais dans mes anciennes fonctions ; pasque je crois que justement le sujet s’y prête totalement et l’illustre parfaitement. Je crois qu’il faut à la fois respecter la liberté d’expression, la liberté artistique, auxquelles nous sommes tous très attachés… mais en même temps il faut trouver le point d’équilibre, donc cette manière de pouvoir exprimer un certain ensemble de choses en les dénonçant et en revendiquant… tout en respectant aussi des choses qui peuvent exister.
- Vous leur lancez une invitation ce soir ?
- Oui moi je lance une invitation. Je souhaiterais organiser une table ronde – tout le monde est le bienvenu – je crois qu’en fait c’est un rendez-vous qu’il faut pas manquer. Il faut que le milieu du rap et tous les rappeurs fassent la démonstration – et je pense particulièrement à un jeune rappeur qu’est très à la mode en ce moment mais qu’est un rappeur qui revient de loin aussi, qui s’appelle Larsen, qui a fait un excellent travail, sur lui-même aussi, qui est un vrai artiste qui dénonce beaucoup de choses, mais qui le denonce avec une intelligence extraordinaire. Je pense que ce serait intéressant que tous les rappeurs se réunissent, qu’y ratent pas ce rendez-vous, de faire la démonstration qu’on peut dénoncer, qu’on peut dire des choses, être contre l’injustice… et en même temps être dans un cadre qui respecte aussi les personnes.
- Pas d’interdiction mais des discussions ?
- Non j’pense pas qu’y faille interdire mais j’pense surtout qu’y faille plutôt, là, dialoguer.
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